Romain Dumas-01

911andCo était présent ce week-end au Le Mans Classic 2018. Pour notre/votre plus grand plaisir, Romain Dumas, double vainqueur des 24H du Mans nous a accordé une interview exclusive. Romain revient sur sa participation à ce bel évènement et nous parle de son implication dans l’organisation du 1er Porsche Rallye Croisière. Un grand merci à ce champion d’exception, porschiste dans l’âme, des plus accessibles, que l’on aura plaisir à revoir prochainement.

Comment s’est déroulé ton week-end à Le Mans Classic ?

Romain : « C’était un bon week-end. C’est toujours bien de rouler avec de vieilles voitures comme ça. On voit énormément de différence entre les voitures avec les années. La plus impressionnante, c’était forcément la 917 de 1969 qui n’était pas la meilleure série de 917 puisque c’était les débuts. Elle avait une réputation d’être très dangereuse, puisque c’était elle qui n’avait aucun accès à l’arrière. Elle partait très facilement en tête à queue, même en ligne droite. Lorsque l’on m’a raconté cela, je n’étais pas très rassuré. Je l’avais déjà essayé à Magny-Cours, mais il pleuvait alors je n’avais fait que quelques tours. C’était la voiture et le châssis numéro 002 qui d’ailleurs n’avaient fait que des essais à l’époque. Freisinger l’a remonté à l’état neuf. J’ai roulé de très nombreuses voitures du musée, mais la 917 est le modèle qui m’impressionne à chaque fois le plus. Pourquoi ? Parce que tu as ce 12 cylindres derrière toi qui fait énormément de bruit, ton casque qui touche le semblant d’arceau fait de petits tubes, tu as un volant de l’époque, 3 branches, qui est flexible et une accélération démoniaque avec très peu d’appui. Tu es vraiment serré dans la voiture. Tu sens qu’il ne faut pas qu’il se passe quelque chose …tu as l’essence autour de toi. C’était une expérience assez drôle, malheureusement, la voiture, étant donné qu’il faisait très chaud et qu’elle était très chaude. Au bout de 2 tours, on avait toujours des problèmes de vapeur d’eau. C’était dommage, mais le but était de roulotter un petit peu.

Après, j’ai roulé un 550 Speedster qui était très sympa. C’était parfait, car au moins j’avais la tête à l’air avec cette grosse chaleur. Ce modèle n’allait pas très vite, mais il était très agréable au final. Ensuite, j’ai conduit pour la Parade Porsche, une 906 du musée. Avec son moteur 2.0l, elle accélérait correctement et néanmoins, elle freinait bien. Elle était plutôt sympa et facile, si ce n’est que les portes se sont ouvertes dans la ligne droite des hunaudières. Et après j’ai roulé une 935, qui avait une particularité. C’est Jurgen Barth qui avait roulé avec, au 1000 km de Silverstone. Il s’agissait d’un châssis unique où les suspensions à l’arrière étaient dimensionnées plus petites que les 935 habituelles, et comme Freisinger a voulu garder la voiture dans l’état de l’époque, en fait au bout de deux séances, on a eu des problèmes de suspensions arrière. C’était dommage.

Parmi les 911 Classic ou même récente ? Quel est ton modèle coup de coeur ?

Romain : « Le truc c’est que dans les Classic en général, que tu parles de voiture de rallye, de proto, de ce que tu veux, ça dépend toujours de ce que tu veux faire avec ta voiture. Tu prends aujourd’hui une 911 de rallye que nous préparons, moi lorsque je roule en rallye historique, moi je roule à 100%. Je ne sais pas que c’est une voiture de 1977. Tout est préparé pour la course actuelle. À part la boîte de vitesses où il faut faire attention, le moteur il monte à 8000 tours/min alors que c’est un moteur de l’époque où en tout cas de conception de l’époque. Le freinage se fait avec des plaquettes actuelles. Les amortisseurs, on a travaillé cela depuis des années, ça prend les trous incroyablement bien. Dans les Classic, cela dépend toujours de la préparation du véhicule et ce que tu attends de la voiture. Quand je roule les voitures du musée, qu’il s’agisse d’une 956, d’une GT1, une Porsche 962, une 935, même la Moby Dick, la Baby, ce que tu veux, elles ont toutes des super points et des mauvais points. Pour exemple, il y avait la 944 qui avait couru au MansC’est très rigolo. C’est très rare de trouver une voiture qui n’a que des bons points. Tu en as qui ont un énorme lag (temps de réponse) au Turbo. Par exemple la 944 GTP qui avait fait le Mans, avec la livrée Boss, elle a un lag au Turbo tu ne peux pas y croire. Tu accélères, la puissance arrive 1,5 seconde après. Tu en a qui ont un très bon moteur, mais une très mauvaise boîte de vitesse, alors que d’autres ont un châssis qui n’est pas terrible. Celle qui me semblait la plus équilibrée, la plus facile à conduire qui me vient à l’esprit, c’est la 935 Baby. Celle-là quand je roulais sous la pluie au mans il y a quelques années, c’était celle qui me faisait penser le plus à une voiture actuelle, il y avait un grip de fou, elle était facile à conduire. C’était en tout cas celle qui m’a plu le plus, mais elles me plaisent toutes parce que forcément elles ont toutes des caractéristiques très différentes et procurent des plaisirs très différents. »

Quelle est ta voiture au quotidien et pourquoi l’as-tu choisi ?

919 hybrid wec nurburgring romain dumas

Romain : « Alors moi je roule avec un Cayenne S, car je suis tout le temps en déplacement et il me faut de la place. J’ai un fils qui a 4 ans et qui aime bien être derrière et qui nous fait prendre beaucoup de chose. Pour moi, la voiture de route en général, c’est vraiment juste fait pour aller d’un point A à un point B, rien d’autre. Maintenant, il est vrai que certaines voitures de route, les sportives telles les GT3, les GT3 RS, voir les 918 Spyder, ce sont devenu des voitures extrêmes. Je suis toujours surpris que des gens, pas que chez Porsche, puissent acheter ça pour la route, car je trouve cela tellement violent, elles ressemblent tellement à des voitures de course. Je me demande comment des gens peuvent rouler avec des voitures comme cela. Pour moi, le grand changement, concernant ces voitures-là, a commencé avec la Carrera GT, qui est une voiture très difficile à conduire vite. D’ailleurs, moi à l’époque, lorsque j’ai fait le tour du monde avec, après que quelqu’un était décédé aux États-Unis avec, j’avais roulé avec au Bresil, en Argentine, à Paris, en Espagne où je faisais essayer la voiture à des clients potentiels. C’est une voiture qui très compliquée à conduire. Cela ne m’étonne pas qu’il y ait eu des accidents, car il faut savoir conduire avec, savoir ce qu’est le survirage si tu veux conduire avec. C’était une voiture qui a l’époque avait été conçue par l’ingénieur Motorsport Roland Kussmaul et le pilote qui avait roulé avec pour la présentation c’était Walter Röhrl, qui est un bon copain de Kussmaul. Mais bon, Walter Röhrl ça ne lui fait pas peur de contrebraquer, ça le fait rire. Mais ça a été le début de ces voitures de route, qui pour moi, ont une allure de voitures de course et ça n’a fait que continuer dans ce sens. Moi, perso, j’ai une 997 GT3 RS 4.0l par exemple, quand je l’utilise, j’ai l’impression d’être dans ma GT3 RS de Rallye. C’est une véritable catapulte. Alors qu’avec 996 GT3 RS, ça commençait à dévier de la GT3, mais pour moi la 4.0l, c’est la voiture la plus extrême. La boîte est dure, mais t’as le moteur qui va avec, il faut savoir conduire. La les nouvelles 991 GT3, t’as le train arrière qui pivote, avec les vitesses au volant, c’est un poil plus facile à conduire. Même avec la 911R, t’as le talon-pointe, alors même si tu ne sais pas le faire t’as l’impression que tu sais le faire. La 997 GT3 4.0l est actuellement la plus extrême des GT3. »

Comment se déroule ta journée actuellement ? Si bien évidemment il y a une journée type.

Romain : « Ma journée type depuis le début d’année, c’est d’avoir un casque sur la tête, ce qui n’est pas mal. C’est l’année où j’ai dû conduire le plus avec 100 jours de pilotage. Là je n’arrête pas de conduire. Là je suis en train de développer un Cayman de Rallye pour Porsche qui fera le Rallye d’Allemagne. En numéro 0, donc une voiture complètement neuve et unique. Dimanche j’étais à Le Mans Classic, lundi 9H j’étais à Alès pour le développement de ce Cayman que nous a confié Porsche. Ce soir, je pars à Goodwood pour le festival, où je roule avec Volkswagen pour faire la course.

Quels sont tes prochains objectifs dans le sport automobile ?

Romain : « C’est une bonne question. Actuellement, j’aimerais gagner les 24H de Daytona, c’est la seule course de 24H que je n’ai encore jamais gagnée. Même si cette année je termine 3ème à 1 minute, je n’ai toujours pas gagné. Ayant gagné toutes les autres, j’aimerais terminer avec celle-là. Bientôt, je vais tester aussi le rallye-cross, pour voir si cela peut me plaire. J’ai relevé de nombreux challenges, il y en a beaucoup, j’en ai fait beaucoup, je vais essayer d’en trouver d’autres, mais à chaque fois la liste se raccourcit. »

En octobre, tu vas participer au 1er Porsche Rallye Croisière. Quel a été ton rôle dans son organisation ?

Romain : « L’an dernier, on avait fait une croisière sur le Rhin avec Ari Vatanen et Sébastien LOEB. Suite à cette croisière, c’est moi qui en ai eu l’idée. J’en ai parlé alors à Christian qui m’a tout de suite dit, il faut qu’on fasse ça, mais qu’avec des Porsche. C’était mon idée, mais Christian étant porschiste, il a tout de suite adhéré. J’ai mis alors Denis Giraudet dans la boucle pour Denis nous fasse un beau tracé. Mon idée c’était d’avoir des Porsche, n’importe quel modèle de Porsche, je ne veux pas que ce soit réservé à l’élite, je ne veux pas que ce soit réservé qu’à une certaine catégorie. Au début, lorsque j’en ai parlé à Porsche France, pour qu’ils soutiennent le projet, on m’a dit ont va faire ça que avec des GT3. Moi j’ai dit non, je veux que ce soit ouvert à n’importe quel Porsche, que ce soit une 911, une 944, un Boxster, une 914, je veux que ce soit avant tout un rendez-vous de passionnés. Moi c’est vraiment sur ça que je veux axer la chose avec les 3 catégories c’est-à-dire du Rallye, du circuit et de la course de côte. On ira sur des tracés de course de côte, sur circuit avec Hockenheim et le Nürbürgring, et sur des tracés de Rallye de WRC. Bien sûr, ce ne sera pas un vrai rallye, car la route est ouverte. Mais après quand j’ai regardé cela, c’est que contrairement à des évènements comme le Tour Auto qui connaît un super engouement ou un autre rallye pourtant très bien organisé que j’ai fait en Espagne l’an dernier et où il n’y avait aussi que des Porsche, mais où tu dois refaire ta valise tous les matins et la défaire tous les soirs. Avec le bateau, tu n’as plus ces contraintes et ça c’est le top, car les spéciales ont été combinées avec le bateau qui va t’attendre tous les soirs et où tout est prêt. C’est-à-dire on arrive, on met la voiture devant et de suite on est dans notre cabine, on prend une douche et on peut se retrouver pour débriefer à l’apéro. C’est vraiment une force de ce format. Tu n’as pas besoin d’attendre en plus chaque jour à l’accueil qu’on te donne ta chambre, puis le matin de faire le check-out. C’est un peu comme si tu te retrouves chez toi, c’est un peu comme un vrai club familial où tout le monde est là pour s’amuser. »

Pour ce 1er Porsche Rallye Croisière, tu vas rouler quelle(s) Porsche ?

Romain : « Je ne pense même pas que je vais rouler. Je vais aller voir les gens rouler, me rendre disponible pour eux. Peut-être que je roulerais, mais ce n’est pas ma priorité. Je serais avec les participants, je serais disponible pour raconter des histoires avec eux, passer de bons moments ensemble avant tout. C’est comme cela que je vois les choses. »

Seras-tu présent sur l’ensemble de la croisière ?

Romain : « Oui, bien sûr, Denis Giraudet aussi d’ailleurs, sera présent du début jusqu’à la fin de la croisière. »

Qu’est-ce que tu as envie de dire aux futurs participants ?

Romain : « L’idée est de partager est de partager un moment entre porschiste, sur de vraies routes, de vrais spéciales de rallye, sur de vrais circuits. Lorsque l’on commence à parler de circuits comme Hockenheim, le Nürbürgring, où de spéciales du rallye d’Allemagne, de championnat du monde, tu peux difficilement rêver de mieux. Après chacun ira à son rythme, sa vitesse, ses envies, mais c’est vraiment pour un partage de haut niveau avec de vrais poschistes passionnés. »

Et bien merci, Romain, tu nous as vraiment donné envie d’y participer. Au plaisir de se revoir en octobre.